mardi 27 juin 2023

[Journal*] mercredi 26 juin 2002

Scanner à Annecy prévu à 14h. On lui interdit de boire (et de manger) toute la journée jusqu'à ce qu'on se trouve à Annecy (15h) en face du praticien : « À chaque fois on leur explique ! Mais bien sûr qu'elle peut boire ! »

Journée extrêmement pénible : une des pires pour Mère. Elle hurle pendant deux heures, de retour à Rumilly, jusqu'à ce qu'elle s'endorme. 

— Seropram. Neuleptil. Tiapridal.

(Rumilly, cuisine, 8h)

Elle tremble, elle a peur, elle m'appelle au secours. R. vient lui prendre la tension : 20-12. C'est énorme. Elle lui donne un anxiolytique et un sédatif. Je vais discuter avec elle dans son bureau. Je reste presque une heure.

Ça y est, elle aussi entonne le discours psy ! Ne vous laissez pas bouffer, etc. J'essaie de lui expliquer. Je vois bien que je lui suis sympathique, elle prend toujours énormément de temps pour parler avec moi, elle se renseigne, tout ça l'intrigue, elle me fait, l'air de rien, un peu de charme, ses avant-bras bronzés et assez poilus me plaisent beaucoup. Il faut imaginer : la fille, encore jeune, jolie, déjà médecin à l'hôpital dans une petite ville de province, donc tous les attributs de la réussite sociale, de la sérénité sociale, d'ailleurs ça y est, on parle piano, elle en a fait «  huit ou dix ans », comme tout le monde, elle rêve d'avoir « un queue » !, son regard brille, je suis sûr que ce soir elle va rentrer (bonjour chéri, bonjour chérie) et mettre un disque de Chopin (les scherzos ?) avant d'aller sous la douche… 

(Hôpital de Rumilly, sept heures moins le quart du soir)

Mère est à nouveau folle ! Elle a été insupportable toute la journée, Je suis allé avec elle au scanner, je suis resté près d'elle le plus possible, mais à aucun moment elle ne m'a souri ni ne m'a dit un mot gentil. Tout ce que je fais (je dis « je » mais je devrais dire « on ») est mal, à côté, inutile, ou néfaste. Je l'entends hurler de l'autre bout du couloir, c'est atroce ! Quand je vais vers elle et que je la prends dans mes bras, elle me repousse en me disant : « Ça ne sert à rien ! » Je lui demande : « Tu veux que je parte ? » Elle répond : « Je veux que tu restes ! » « Eh bien alors je reste près de toi. » « ÇA NE SERT À RIEN ! » crie-t-elle. C'est à devenir fou. Elle ajoute même, au cas où je n'aurais pas compris : « Je n'ai pas besoin de ta présence, tu es comme les autres ! »