mercredi 22 janvier 2014

Dies irae


Il va tous nous tuer ? Tous, jusqu'au dernier. On fait comme si on ne le savait pas. C'est pourtant ce qu'il fait depuis que le monde est monde. Il y met un point d'honneur. Les hommes, les animaux, les bactéries, les oiseaux, tout y passe, chaque être vivant. Il n'en rate aucun. Mêmes les créatures du fond de l'océan, celles qu'on ne voit jamais ? Même celles-là ! Et le point noir minuscule, tout là-haut, dans la nuée ? Pareil. Les plus grands massacres, les génocides, perpétrés par les hommes, à côté, ce n'est rien, ça ne compte pas. On ne verrait pas la différence, au bout du compte. 

Il ne nous sort du noir que pour mieux nous y replonger. Juste le temps qu'on aperçoive du blanc, du rouge, du jaune, du bleu, un peu de violet, et hop, c'est fini, noir total. Toutes ces femmes qui accouchent, à l'hôpital, chez elle dans leur baignoire, au bord de la rivière, dans la voiture, qui gueulent tout ce qu'elles peuvent et se prennent pour des héroïnes, qui mettent leurs exploits sur Youtube, qui se font filmer, applaudir, lapider, violer, payer, qui nous obligent à regarder entre leurs jambes, le saint sacrement des origines, tout ce théâtre glaireux et sanguinolent, toute cette lamentable frime pour qu'on ait l'impression d'être vivant. Action. Cut. Vivant de quoi ? Quel cinéma ! Vous allez manifester, ce week-end ? Vous n'y allez pas ? Vous allez regarder la télé, alors ? Il y a un reportage sur les fourmis. Je parie qu'on va nous parler de démocratie…

Ma vie, mon œuvre, mon tas d'or, toutes les filles que j'ai baisées. Une fois qu'on a réglé ce dossier, qu'est-ce qu'on fait ? Sur Flickr, on m'a invité à devenir membre du Club of Extraordinary Green Sexy Dress. Je me tâte… Que ne ferait-on pas pour se sentir vivant !

(à Monsieur Jean-Philippe Boursier)