samedi 17 août 2019

Sur la corrida



Monsieur Tout est devenu monsieur Toutou.

Les hommes d'autrefois rêvaient de géants, de monstres, de feu, de divinités et de destins, de grandeur et d'abîmes. Ils veulent aujourd'hui caresser leur petit chien, lui faire des papouilles, lui offrir des friandises. Alors, évidemment, Napoléon ! 

L'idéal est de ne plus souffrir, de traverser la vie en restant à l'abri de l'éclat. La cruauté est hors-jeu. L'amour est un soin palliatif comme un autre. Les deux sexes étaient trop différents, trop opposés, c'est pourquoi l'on a inventé les genres : le genre, c'est le continuum, c'est le fondu-enchaîné, c'est le choix reporté à une date ultérieure, le genre, c'est l'inopposition élevée au biologique, c'est le noir fondu au rose, c'est la confrontation évitée, c'est l'achèvement. L'Autre a été avalé et digéré par le Même. 

Alors on s'identifie à l'animal. On devient la bête. On souffre avec elle. C'est Sympa au Golgotha. Si l'on pouvait récrire la Passion sans la crucifixion… pourquoi dites-vous « si l'on pouvait » ? Si Jésus avait connu le lexomil, si Pilate avait connu Facebook, si Eve était anorexique, si les taureaux restaient en vie, si la mort n'existait pas, si les questions avaient des réponses, si les phrases n'avaient pas de fin…

S'il n'y avait pas l'absence, et tout cet espace entre nous, si le non-être n'existait pas, j'aurais pu parler de la corrida. Peut-être.