jeudi 20 septembre 2012

Vacances. Onze anus à Tora-Bora (1)


Je n'ai aucun ami. Je préférerais… Les amis sont les pires ordures qui se puissent concevoir. Il n'y a rien de pire qu'un ami. J'ai plus d'affection pour Ben Laden que pour mes amis. Certes, il existent des ordures aussi parmi les ennemis, mais beaucoup moins que parmi les amis. Quand je pense "aux amis", je pense toujours à ce bar, à Paris, dans la rue du Roi du Sicile, je crois, dont l'enseigne semblait proclamer : "Bar des anus", à cause d'une typographie défaillante. Le M, mal amputé par un chirurgien borgne, s'était émietté en N-U. M'étonne pas ! Finalement, le seul labeur, la seule œuvre vraiment utile dans une vie d'homme est de se débarrasser de tous les amis qui ont cru devoir venir se réchauffer dans votre tanière. Ça peut prendre du temps. Il faut être patient. Tout le reste, à côté, n'a que peu d'importance. J'ai fait de la confiture de figues. Dans les montagnes de Tora-Bora, en décembre, il souffle un vent glacé. Nous regardons la télévision. Un documentaire sur les insectes. Mouches, araignées, fourmis. En plein milieu Céline se lève précipitamment et court aux toilettes. On l'entend vomir bruyamment. On change de chaîne, on tombe sur le film qu'a réalisé Romano Vanderbes. Le type est en train de griller sur la chaise, elle repart en courant aux toilettes. Les grottes sont bien aménagées, on a tout le confort. L'autre andouille me téléphone : on peut pas suivre, les cours sont trop chers. Et tu m'appelles pour ça ? Pauvre tarte. Merdeuse. On doit rester deux semaines. Dans deux semaines, il ne doit plus rester qu'un seul d'entre nous. J'avais toujours voulu visiter l'Afghanistan. Ici il n'est pas interdit de fumer. Onze chambres, une chacun, plus une salle de sport. J'ai un piano dans la mienne. Trois salles de bains. Cuisine commune bien sûr. C'est toujours moi qui prépare les repas. De vraies vacances, enfin ! J'ai apporté Jeux, de Debussy, comme seule musique. J'interdis à quiconque de mettre autre chose. Christiane a essayé, elle en est morte, le premier jour. Maintenant je suis tranquille. Pas de voisins, seulement les chiens qui viennent chercher un peu de nourriture deux fois par jour. Ils ont l'habitude. Je note : "Un peu plus vite." Ça avance bien.