Quelque chose se lève, dans le Kyrie du requiem de Fauré, une vague d'une infinie tendresse qui monte du sol et nous enlace. Je m'effondre, je me laisse choir dans cette douceur : écouter ce requiem donne envie de mourir ; pas de désespoir, pas d'angoisse, mais de plaisir — la joie peut être le négatif heureux de la joie. La volupté de la mort est tellement perceptible ici qu'on se demande pourquoi les gens ne se suicident pas en masse en écoutant cette musique. Fauré ne cherche pas à faire peur, c'est le moins qu'on puisse dire. Moi qui crains la mort comme on craint l'inconnu, mes frayeurs se dissolvent dans un liquide amniotique quand j'écoute ces quelques pages On a le temps. On est le temps. Ce n'est plus l'adversaire. Sa matière nous pénètre entièrement, se répand en nous jusqu'au fond de notre sang, plus loin encore. La volupté et la mort sont une seule et même chose. Le Requiem de Fauré, c'est un orgasme lent, infiniment lent, immobile, et tout est dit dans les deux premiers morceaux, l'Introït et le Kyrie. Le reste est presque du décor, illustration et commentaire de cette vérité qui est entrée en nous comme un gaz que rien n'aurait pu arrêter, aucun accident, aucune péripétie, aucune pensée. On voit sans crainte les grandes portes s'ouvrir lentement. On est sur le seuil. On va avancer…
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