vendredi 25 avril 2014

C'est encore loin ?


« Si, pour atteindre l'authenticité, la voie la plus directe est désormais impraticable, alors il nous faut emprunter le chemin le plus long. » L'électricité est coupée. Ce qui signifie : pas d'Internet. Le café à l'ancienne, en faisant chauffer l'eau sur le gaz. Pas de téléphone. Le temps est immédiatement différent. (Mais je peux tout de même écouter Helen Merrill grâce à l'ordinateur portable.) Toute ma vie n'est que l'histoire de ce détour, de tous ces détours, innombrables, souvent sans espoir, pour parvenir à l'authentique, à une certaine vérité. Si l'on m'indique un chemin direct, immédiatement je me raidis, je résiste, je n'y parviens pas, mes jambes se dérobent. L'herbe est haute, il fait bon, les fleurs sont nombreuses, je sens leur parfum. Les idées sont des constellations qui s'impriment sur le vivant. Dans la symphonie que je ne finirai sans doute jamais, cela se traduit par des harmonies (ou des thèmes) qui lentement émergent du bruit blanc. Visages qui sortent du sable, qui surgissent dans les rêves. La cabane de Mahler ou celle de Thoreau, la hutte de Heidegger, la niche de Luna. Je n'aurais jamais cru ça possible, mais il y a incontestablement un retour d'un certain "ordre moral" à droite. Il y a encore cinq ans, dire cela aurait été grotesque et surtout malhonnête, mais depuis quelque temps, on le sent, c'est indubitable. Les odeurs de la revanche, ces odeurs qu'on déteste plus que tout. "Juste retour des choses" ? Non, jamais juste, toujours immonde et dégueulasse. "Boulevard Voltaire" est l'épicentre de ce mouvement. Ce matin, je suis allé lire les commentaires sous un article consacré à Anne Sinclair. La répugnance qu'on a à lire ça est presque impossible à dire. L'envie, la jalousie, le ressentiment, les complexes sociaux s'y donnent à lire avec une brutalité qui dépasse tout. On sent les désirs à vif de ceux qui aiment couper les têtes, qui veulent voir le sang couler. La poubelle est en train de déborder. Merveilleux Internet… Guilaine Depis (de La-Vie-Merveilleuse-point-com) établit un palmarès des œuvres de Wagner, dont elle est en train de devenir la grande spécialiste. En bons derniers arrivent Tristan et le Crépuscule… Je vois là un symptôme extraordinairement parlant de l'aplatissement numérique du Goût. D'autres se félicitent que "Barthes soit mort dans un accident de la circulation" (bien fait ! il sortait d'un déjeuner avec Mitterrand). D'autres encore luttent contre ce qu'ils nomment avec une gourmandise hystérique la "pédophilie". Je dis numérique mais je pourrais évidemment dire démocratique. Elle me dit : « Avec son gros pif ! » Oui, mais elle est quand-même jolie, non ? Non ! Les complexes sociaux, ah, on pourrait en écrire, sur le sujet ! On croyait qu'il suffisait d'avoir un sexe de taille à peu près normale pour jouer, comme ils disent "dans la cour des grands", mais le sexe mental, mon Dieu… Quand je me réveille vers une heure et demie du matin, c'est très souvent que je me sens piégé par l'imbécillité. Imbécillité prend deux "l" ! Tiens tiens… "Sinclair" ? "Schwarz"… Ah. Bien. Bien fait ! « Ils se marient entre eux… » Ah. Bien. Avec son gros pif… Jean-Marc, ce gros con. On a envie de faire se rencontrer certaines gens, pour voir. Le chemin le plus long, en effet. Toujours. La démocratie, la République, et les rêves. Je saute, de plus en plus souvent, d'un rêve à l'autre. Je suis dans un rêve a, et je me dis, tiens, et si je passais au Rêve B ? Et dans le "rêve b", je me dis que je suis en train de rêver du Rêve A, qui n'était pas si mal, dis-donc ! Connaissez-vous Zbigniew Rybczyński ? Dommage que mon ordinateur soit en panne, j'ai des idées de dessin animé que j'aimerais bien mettre en pratique. Avec son gros pif… La poubelle est en train de déborder ! Tout à l'heure j'ai photographié mes iris et mes roses, le jardin, alors que la lumière était en train de changer. Sur Internet, la poubelle déborde, et au jardin, le paradis fait un petit tour ni vu ni connu. Elle préfère Tannhäuser… Avec son gros pif. Et ses yeux en boutons de guêtres… Il parlait comme ça de Petite mère. Gros con. La morale a été tellement bafouée, si longtemps, qu'elle revient sous forme de farce, comme d'habitude. Les "dégommeurs", les "déboulonneurs", les "parler-franc" entrent dans la carrière. Onfray c'quon peut, et on dirait qu'on est les Gentils. Bonne Parole et Petit Zizi sont dans un Bateau, Bon Zizi tombe à l'eau, qu'est-ce qui reste ? La culotte de ta sœur. La Revanche de la Quadrature du Cercle des paumés, c'est Internet. Rien fait, rien dit, rien produit, rien dessiné, rien écrit, rien pensé, rien composé, mais QUAND-MÊME. Ça fait rien. J'EXISTE. Mais oui, toute petite chose, tu existes. Si au moins on en doutait… Alors il dit : « Vieux quinquagénaire satyre. » Il a dit quelque chose. Il pointe le Mal, il sait d'où vient le Mal, la France qui périclite, tout ça, il dit il énonce il se prend en photo en train d'exister. C'est le Grand Machin, c'est le Grand Truc, je vous le dis ! « Mais enfin… C'est impossible ! Vous… Excusez-moi. Peut-être vous êtes-vous trompés dans vos calculs ?… » Tintin, il y en a deux qui bavardent, là-bas… Ils refont leurs calculs, tous, ils empilent leurs équations, ils arrivent toujours au même résultat : LaCata. Les Visages sortent du sable, on les reconnaît, ce sont bien ceux du Désastre. Passons au Rêve B, la rue est barrée. Tous, désormais, ils se réclament de Muray. Muray aurait aimé, Muray aurait adoré, Muray aurait dit, Muray aurait ceci-cela, fait caca, fait un procès, fait sous lui, fait son selfie, mis une bombe, liké Truc et pas Machin, aurait voté comme ci mais pas comme ça, et d'ailleurs il aurait lu ça et écrit ci, si si, je le sais, j'ai bien connu sa mère et son chien. Les Situs sont de retour mais ils jouent du banjo avec la Dombasle. Et moi je suis planqué dans la poubelle, mes fringues commencent à puer sacrément, je te dis que ça. Dis, Luna, c'est encore loin ?