jeudi 9 février 2012

Dormir !


La seule grande affaire de ma vie aura été de dormir. Dormir, toujours plus, toujours plus longtemps, toujours plus profond. Je plains les imbéciles qui ne comprendront pas et c'est à peu près le monde entier. Pour être vivant, ici, là, maintenant, il faut dormir, s'enfoncer dans le sommeil, comme une planète qui s'enfonce dans le soleil. Être au cœur du réacteur, leur donner des taches, se laisser porter par les vents solaires, passer en rafales au-dessus de leurs têtes, voir leurs grands yeux ouverts et morts, vitreux, sales, éperdus, mais surtout ne pas s'arrêter, ne pas ralentir. Être au centre du feu, écouter le 24e concerto de Mozart, celui qui n'a pas de fin, celui dont l'ut mineur brûle les nerfs, l'écouter à l'intérieur, le rejouer sans cesse. Je suis aveugle, je suis sourd, je suis impotent, paralysé ? Qu'importe ! Mon corps est plus vivant que celui de tous ces insomniaques suintants dont les gestes affolés et lourds les éloignent un peu plus à chaque instant de la Joie.