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lundi 16 novembre 2020

Le Portail

J'avais douze ans, ce matin-là, quand André Carlioz est venu nous dire, très énervé : « Bon, vous entrez ou vous sortez ? » Mais nous n'avions pas à sortir, puisque nous étions dehors. 

Je l'ai revu, trente-cinq ans après, dans une chambre d'hôpital, qui chantait le Salve Regina à l'oreille d'une mourante.

dimanche 2 juin 2019

Catholique

Pourquoi je suis un catholique malheureux – j'ai écrit "inconséquent", l'autre jour, sur Facebook ? Parce que les seuls qui me comprennent sont de farouches anti-catholiques. Je ne peux pas leur donner tort, à ceux-là, et même, très souvent, je leur donne raison. Pourtant, je n'appartiens pas, je n'appartiendrai jamais au même monde. 

dimanche 11 mars 2012

Ils sont tous protestants !


Le christianisme est la religion de l'Europe : ce sol lui convient plus même que son pays natal ; il y a poussé des racines profondes ; il s'y est mêlé à toutes nos institutions : pour toutes les nations du Nord de l'Europe et pour toutes celles qui, dans le Midi de cette partie du monde, se sont substituées aux Romains, le christianisme est aussi ancien que la civilisation. C'est la main de cette religion qui façonna ces nations neuves ; la croix est sur toutes les couronnes ; tous les codes commencent par le symbole : les rois sont des oints, la religion est civile ; les deux puissances se confondent ; chacune emprunte de l'autre une partie de sa force, et, malgré les querelles qui ont divisé ces deux sœurs, elles ne peuvent vivre séparées.

L'homme le plus hardi ne saurait rien imaginer qu'on puisse substituer à ce système religieux. Tous nos Érostrastes ont détruit ; aucun n'a substitué, aucun même n'a osé proposer quelque chose à la place de ce qu'il voulait faire disparaître ; en sorte qu'il faut toujours être chrétien ou rien.

Mais le principe fondamental de cette religion, l'axiome primitif sur lequel reposait tout l'univers avant les novateurs du XVIe siècle, c'était l'infaillibilité de l'enseignement d'où résulte le respect aveugle pour l'autorité, l'abnégation de tout raisonnement individuel, et par conséquent l'universalité de croyance.

Or ces novateurs sapèrent cette base : ils substituèrent le jugement particulier au jugement catholique ; ils substituèrent follement l'autorité exclusive d'un tiers à celle du ministère enseignant plus ancien que le livre et chargé de nous l'expliquer.

De là vient le caractère particulier de l'hérésie du XVIe siècle. Elle n'est point seulement une hérésie religieuse, mais une hérésie civile, parce qu'en affranchissant le peuple du joug de l'obéissance et lui accordant la souveraineté religieuse, elle déchaîne l'orgueil général contre l'autorité, et met la discussion à la place de l'obéissance.

De là ce caractère terrible que le protestantisme déployé dès son berceau : il est né rebelle, et l'insurrection est son état habituel.
(…)
Hommes des tous les pays et de tous les cultes, observateurs de tous les systèmes, remarquez bien et ne l'oubliez pas : L'évangile enseigné par l'église protestante n'a jamais fait peur à Robespierre.
(…)
Certains Indiens disent que la terre repose sur un grand éléphant ; et si on leur demande sur quoi s'appuie l'éléphant, ils répondent : sur une grande tortue. Jusque là tout va bien, et la terre ne court pas le moindre risque ; mais si on les presse et qu'on leur demande encore quel est le soutien de la grande tortue, ils se taisent et la laissent en l'air.
La théologie protestante ressemble tout à fait à cette physique indienne. Elle appuie le salut sur la foi, et la foi sur le livre : quant au livre, c'est la grande tortue.
(…)
Le grand ennemi de l'Europe qu'il importe d'étouffer par tous les moyens qui ne sont pas des crimes, l'ulcère funeste qui s'attache à toutes les souverainetés et qui les ronge sans relâche ; le fils de l'orgueil, le père de l'anarchie, le dissolvant universel, c'est le protestantisme.

Envie de recopier tout Joseph de Maistre, ce matin… Que nos laïcards tocards le lisent un peu, et peut-être même, à la lumière de notre temps funeste, le comprennent, voilà qui serait une grâce ! Pour le dire à la manière maistrienne, il faut être "catholique ou rien". Le protestantisme, ce n'est rien, l'islamisme, ce n'est rien. J'ai entendu Kristeva hier à la radio qui parlait, avec une gâteuse gourmandise, des "multivers" ; le multivers / l'univers, bien sûr, comme preuve de l'erreur profonde du catholicisme. Encore un gadget pour amuser les enfants… Comment peut-on être aussi bête ?

mardi 27 décembre 2011

Au bord du fleuve


Je suis catholique. Et vous ? Non, vous ne l'êtes pas, vous ne pouvez pas l'être. « Au bord du fleuve, le miracle des fleurs, sans fin. / A qui se confier ? On en deviendrait fou. » Le catholique est celui qui a rencontré une fleur, et qui deviendrait fou de ne pas savoir annoncer la bonne nouvelle. Les pires sont sans doute ceux qui vont à la messe et participent aux processions, et recopient pieusement des extraits de la Bible dans leurs semainiers. À Sainte-Agathe, l'orgue est dans un profond sommeil, personne n'écoute plus sa voix, alors il se tait. Il attend. Personne n'est plus catholique, là-bas. Dans ma jeunesse déjà la chose se faisait rare. Il fallait sentir alors ce qui allait advenir. Une certaine manière d'écouter le premier concerto de Chopin, avec Papa, qui pleurait, son violon sur les genoux. Voir la lumière à travers les larmes du père, comme on voit le saint Esprit dans la lumière qui tombe des vitraux dans la nef. Je suis assis à la tribune, là-haut, à côté de Georges, je sens son exaspération pendant que le prêtre fait son office, d'un air las. Georges était déjà dans la tombe, avec ses sourcils en bataille et sa voix suave, me parlant d'étymologie pendant que les fidèles répétaient les vieilles phrases, sans les comprendre. Je suis en culottes courtes et je regarde Maman, en bas, la plus belle, et je me demande ce qu'est un miracle.

Je pose mes mains, doucement, sur l'ivoire jauni du vieil Erard. Je n'enfonce pas les touches, je reste là à sentir la voix qui monte, j'ai la chair de poule, j'entends Maman qui s'affaire dans la cuisine, qui prépare le petit déjeuner pour tout le monde, je sens l'odeur de la brioche. Je regarde, au-dessus du piano, les deux portraits de Mozart et de Beethoven, et, sur l'autre mur, celui de saint Jérôme, et je me sens au bord d'un fleuve. Les bruits dans la maison, les odeurs de la maison, le chat Abdou qui grimpe sur mes genoux, la voix de ma mère, la partition sur le pupitre, et l'hostie que je viens d'avaler, dont je sens encore le goût fade, sur ma langue, le corps du Christ, ne pas mâcher, Wilhelm Backhaus qui joue le premier concerto, le thème en mi majeur, que j'attends chaque fois, les larmes aux yeux, et l'incroyable modulation en ut majeur, et alors je me lève, je vérifie que personne ne peut me voir, et je dirige l'orchestre, c'est moi qui fais couler le fleuve. Ce bonheur, c'est à devenir fou.

lundi 15 août 2011

Nationale 7


Allaitement et ramadan, compatibles ? Guerre civile et lait cru, compatibles ? Dijon Bourdier et im-pensable, compatibles ? Facebook et transpiration, compatibles ? Ne cherchez pas, je suis le seul à poser les bonnes questions.

La France est en pente, pas lente. Dans les descentes, il faut se délester, jeter le superflu, le Sens est déjà assez fatigué comme ça, et courir le pantalon sur les chevilles n'est pas donné à tout le monde, même quand il s'agit de faire plaisir aux minorités majeures. La Grand'Messe fraternitaire s'accommode des restes du Grand Repas chrétien parce que ses fidèles ignorent tout des aliments qu'ils ingurgitent avec la gloutonnerie indifférente du débutant. Ils n'en reconnaissent pas les contours, ils les prennent pour les créations arte povera d'une nouvelle cuisine destinée à passer très vite, sans imaginer un seul instant qu'avant d'être ces reliefs aux formes étranges, ces quelques figures rachitiques étaient habitées d'un feu et d'une pensée grandioses. Les sans-mémoire d'identité qui peuplent nos nations ont vaguement le sentiment que "ça leur rappelle quelque chose", mais ils préfèrent en situer l'origine en une quelconque terre vierge et sauvage car c'est plus conforme à leur camelote mythologique. Ils sont prêts à embrasser toutes les religions sauf une, la leur, parce que c'est la seule capable de faire sortir l'homme du religieux, et qu'ils ne le supportent pas. Dans le fond, ces soi-disants athées ou anti-religieux ou laïcards ou républicains ou socialistes, en fait tous ceux qui s'aspergent matin et soir de progressisme, ont moins de différences avec les punaises catholiques, protestantes ou musulmanes qu'avec ceux qui les ont précédés en notre vieille France, fille aînée de l'Église

Écoutez-les parler, par exemple, avec ce vibrato si reconnaissable dans sa moiteur sexuelle, des "printemps arabes". Comme l'on sent bien la turgescence qui pointe sous la robe de bure du Citoyen universel ! Enfin, tiendraient-il un début de commencement de cette Vérité-en-marche qui n'en finit plus de se faire désirer ? On avait failli attendre ! Comme le ridicule est mort depuis belle lurette, on ne risque plus rien à se tromper, dans un monde qui urine sans répit depuis ses lanternes éternelles. Facebook, c'était cool, la Bloge c'est fun, mais soudain trouver dans la vraie vie des figurants qui veulent bien jouer avec nous sous les caméras du monde entier, c'est tout de même autre chose ! Les intermittents du Spectacle de chez nous ne valant rien, et les distances ayant été abolies ainsi que les dogmes et les frontières, on va délocaliser Hope Factor et aller s'éclater avec les jeunes forces vives de l'Europe-du-sud, qui feront écho à leurs semblables, le grand Autre en dissémination perpétuelle qui bat le pavé chez nous. Nous qui avons connu l'Hiver yougoslave, l'automne tchécoslovaque et l'été indien, un printemps, fût-il arabe, ne nous tourne pas les sangs, d'autant qu'il n'est pas dit que l'avenir du socialisme soit derrière nous, tant notre Europe nous paraît de plus en plus devoir en réaliser la part la plus sombre. Ce que l'URSS a échoué à imposer à ses citoyens rétrogrades et grincheux, l'Europe va vous le faire aimer : Quand on utilise avec allégresse cette métaphore du "printemps", il faut se rappeler que naguère certains voulaient créer un "homme nouveau". Vous pensiez qu'Europa était fille de Beethoven, Montaigne, Dante, Shakespeare, Debussy, Verdi, Rembrandt, Cervantes, Watteau, Berio ? Pour savoir, savoir sans illusion, ce qu'est l'Europe aujourd'hui, il faut aller dans une de ces boîtes de nuit de la côte d'Azur où "l'élite" dépense 900 000 euros en une soirée. Entre DJ, putes et maquereaux, Europa, assourdie par les milliers de watts de la-scène-créative-contemporaine, se fait toute petite : tout le monde a compris que c'était une pauvre vieille fille ridée et craintive, qui n'est là finalement que pour rassurer ceux qui l'ignorent, en leur prouvant complaisamment qu'ils peuvent tout lui faire, dans la plus complète impunité. Car ce qui caractérise avant tout notre temps, c'est la compatibilité de tout avec tout, tant "la faute de goût" a été définitivement éradiquée, et jusqu'à son souvenir. Quand on a tout balancé par-dessus bord, quand on vient nu comme le nouveau né, quand la mémoire est une cire fraîche en laquelle toutes les odeurs et toutes les fables s'incrustent comme des sans-gêne, quand l'Histoire est récrite chaque jour comme le prévoyait Orwell, sans résistance aucune, occupés que nous sommes à faire la fête, alors les Monstres peuvent débarquer parmi nous, incognito, sans que personne ne songe même à leur demander qui ils sont, d'où ils viennent, et ce qu'ils ont à nous dire. D'ailleurs il importe peu de leur demander ce qu'ils ont à nous dire, puisque nous le savons déjà : nous appartenons à une espèce tombée, et ces monstres ne sont que les habitants du pays qui est au bas de la Pente. En réalité, ce ne sont pas eux qui sont chez nous, mais nous qui nous sommes rendus chez eux.

J'essaierais bien de prétendre qu'entre Nationale 7, Douce France, La Folle complainte et Y'a d'la joie, Charles Trenet avait écrit l'histoire qui nous occupe, à sa façon tendre, laconique et discrètement ironique, mais je sens que vous allez encore hausser les épaules…

vendredi 5 novembre 2010

Avec Claudine


— À quoi tu penses ?
— À mes talons de chèques.
— Tu savais que Léon-Paul avait une maitresse ?
— J'ai croisé Palamède tout à l'heure dans le couloir, tu penses bien qu'il m'a raconté.
— Qu'il ait une maitresse, encore, passe, mais qu'il l'amène ici, je trouve ça un peu fort !
— Oui…
— Ça ne t'intéresse pas ?
— Non.
— Je vois. Mais que penses-tu des Mahométans ? Anne-Marie ne parle que de ça, elle.
— Je m'en moque.
— C'que tu peux être renfrogné, parfois ! Le monde ne t'intéresse pas ?
— Non.
— Et mes fesses, tu les aimes, mes fesses ?
— Oui, beaucoup.
— C'est gentil, ça ! T'es un bon gars, en somme, mais tu l'caches bien. Enfin, moi c'est c'que j'pense en tout cas. Tu devrais moins fumer, Georges !
— Tu vois, ce qui m'étonne, finalement, c'est qu'une religion soit née en quelque sorte pour nous défaire de la religion. Ça c'est un fameux coup, non ? Qu'on s'étonne, après ça, que tous les religieux s'en prennent à elle !
— Je ne comprends rien, mon chou. Tu sais, moi la religion, c'est deux fois par an, pour faire plaisir à maman.
— Je sais. J'ai eu une idée, tiens, je devrais ouvrir un blogue.
— C'est quoi encore, ce machin ?
— Une idée que j'ai eue, tout à l'heure, pendant qu'on… Je ne peux pas t'expliquer, tu ne comprendrais pas.
— Si c'est encore des claques sur les fesses, je te préviens, c'est non !
— C'est un peu ça, mais tu ne sentiras rien, je te le promets.
— …
— Claudine, je peux vraiment te faire avaler n'importe quoi, hein !
— Mais tu le sais bien, mon gros chou !