Michou Pectorian a fière allure. Les femmes, quand il passe dans la rue, ont des trépidations du naso-labial qui font contagion. Quiconque le croise a conscience de l'événement. Ce n'est pas tous les jours qu'on voit d'la came de c'niveau, comme dit Jessica à Léa, les sourcils transpirants. Mais l'allure c'est encore rien, quand on a la bonne fortune de l'entendre causer, de le voir et de l'entendre, face à sa caméra, installé un peu affalé dans son fauteuil bas, la voix faussement négligente décontractée bien parigote par rafales en descente cool et en harmoniques graves. Le mec est las, ou bien indigné, ou excédé, mais doucement, comme un mâle qui rentre au bercail après avoir chassé la pitance pour les femelles. On le sent bien, qu'il est de la race des dominants au cœur tendre, ça passe l'écran, ça harponne sévère les viscères.
J'ai appris qu'il donnait des conférences, Michou. Des conférences de quoi, je ne sais pas. Mais des conférences. Sacré Michou ! Ses biceps ont encore grossi depuis la dernière fois que je l'ai vu. Ça ne va donc plus s'arrêter ? Nous sommes quelques uns à penser qu'il cache quelque chose dans ses biceps. Quoi ? Mais l'Humanité, bien sûr !
Si l'obscénité était un pays, Michou Pectorian en serait la Marianne, mais l'obscénité n'a pas de pays, elle est citoyenne du monde, et Michou est son John Wayne. Partout où elle passe, il veut lui sauver la mise, car il sait qu'elle court de graves dangers. Alors Michou arrive à dada sur sa Harley bodybuildée qui sent l'huile de ricin et la pâtisserie trop sucrée, et la belle Obscénité lui tombe dans les bras en faisant son signe de croix. C'est beau comme l'Antique.
Le meilleur de Michou Pectorian, sa part la plus fun, apte à déchirer son ensemble de personnes ayant entre elles des caractères communs importants, c'est son accent américain, I desire to say. Son accent américain est plus vrai que nature : il en remontrerait facilement au plus yankee des Yankees, Michou. Quand il commence à parler en américain, j'attache toutes mes ceintures, je remets mon dentier, et j'ajuste ma moumoute. Il est là pour nous dire ce qui se passe dans son pays, assis face à nous, dans sa belle veste bleu pétrole, le poil dru mais le torse modeste. Écoutez la musique, en fond sonore. Quelques notes de piano, sentimentales, tristes, qui s'égrènent discrètement tandis que l'oracle sévère délivre son message au monde. Ah, cette musique… « Ce que je vais vous dire n'est pas facile à dire, ni à entendre… » nous dit Michou Pectorian sur un ton grave. On a envie de le rassurer, Michou : la musique qu'il a choisie le dit très bien toute seule.
À M. Philippe Jarry