dimanche 13 janvier 2013

Caramel Hollande



Quand on observe Caramel Hollande, on ne peut qu'être frappé par le caractère ubuesque du personnage. Est-il réellement possible que cet homme là soit le président d'un pays comme la France ? On est saisi d'un sentiment puissant et très étrange : c'est impossible, on est en train de rêver. Tout dans ses manières, dans sa physionomie, dans son langage, son regard, ses gestes, sa tenue, dit emphatiquement l'impossibilité à assumer pareille fonction. Alors, que s'est-il passé pour qu'il soit à cette place, pour que des millions de Français aient voté pour lui ? Il faut que je me corrige, car ce que j'ai écrit est faux, Caramel Hollande n'est pas ubuesque : Le Père Ubu a une forme de drôlerie, d'excès, de flatulence spirituelle qui fait défaut à notre Machin présidentiel. Nous avons connu déjà des présidents par excès, qui en faisaient trop, qui étaient trop là, qui faisaient trop de gestes (et parfois pas les bons), dont le corps dépassait l'habit mal taillé, et d'autres sans doute un peu ternes, mais je ne crois pas que nous ayons jusqu'à présent connu un président par défaut, toujours en-deçà, toujours à la poursuite de sa fonction, en souffrance de pouvoir, en mal de décision, dont l'inexactitude foncière et la maladresse profonde se voient comme le nez au milieu de la figure. Il n'y croit pas lui-même. Contre-emploi, dit-on dans le monde du cinéma, erreur de casting. On se souvient de Johnny Hallyday chez Godard. On se rappelle ce malaise à voir un tel acteur dans un tel film, mais ici, nul réalisateur de génie, nul scénario impeccable, aucun humour, rien n'est à même d'éviter la nausée profonde qui nous soulève le cœur et nous laisse sidérés, muets et titubants sur le trottoir de la cité recouvert de crottes fumantes. Il y a une malédiction des François modernes à la tête des Français. François Mitterrand n'était pas de gauche, il était mitterrandien, François Hollande n'est pas non plus "de gauche", il est gauche. La Gauche française depuis quelques décennies a l'art de nous refourguer plus souvent qu'à leurs tours ces personnages de décomposition qui ont l'air étonnés eux-mêmes qu'on les prenne au sérieux mais qui, beaux joueurs, entrent avec gourmandise — et une certaine candeur — dans la peau de celui qui a annulé au dernier moment la représentation. Ce sont les politiques pieds-levés.

À propos de pied levé, il fallait voir Angela Merkel guider Caramel Hollande sur un quelconque tapis rouge, devant des militaires et des journalistes, si je me souviens bien, il fallait voir ce couple extraordinaire, digne des grands films comiques des années 1920, pour être convaincu que la farce allait prendre des dimensions épiques et historiques. Cinq ans à ce régime : quelle nation pourrait survivre à pareille pénurie, je ne dirais même pas de l'esprit ou de la grandeur, mais de la simple dignité, ou plus simplement encore de la vraisemblance, quel état pourrait supporter cinq années de ridicule porté à ce degré ? Même une nation d'opérette n'y survivrait pas longtemps. À peine Caramel Hollande était-il arrivé au Château, d'ailleurs, que son entourage proche se chargeait de démontrer avec une hystérie éprouvante à quelle ouvreuse de théâtre de boulevard nous avions confié nos gants et notre pardessus. Le ton était donné immédiatement, de manière à la fois péremptoire et tragi-comique. À époque de blague, gouvernement de comiques. Malheureusement pour nous, les blagueurs de ce début de siècle ne sont pas bons, ils sont même mauvais, et à leur manque de talent ajoutent une arrogance en proportion de ce manque. Ce ne sont pas les préliminaires empruntés de débutants, auxquels nous avons assisté, interdits, mais l'ordinaire flasque de ce pouvoir là, qui compte bien pousser l'aspartamisme jusqu'en ses extrémités les plus pathétiques. Les acteurs sont collants, le metteur en scène glycérique, l'équipe technique s'est dissoute dans la mélasse, et d'ailleurs ce sont les mêmes, les mêmes qui prennent par capillarité l'informe et l'aspect de ce président qui colle aux dents.

Les Français ont donc porté au pouvoir Caramel Hollande. Peut-être n'avaient-ils plus assez de force pour hisser à cette place un véritable chef d'État, peut-être se sont-ils rabattus d'instinct sur le plus léger, le plus inconsistant, le plus mou, celui qu'un coup de vent emportera sans laisser de traces autres qu'un rictus désolé et vaguement honteux ? On ne peut pas ne pas se dire que les Français ont reculé pour mieux sauter, qu'ils ont senti que la prochaine étape de l'histoire serait brutale et décisive, et qu'ils ont voulu se laisser un dernier répit pour reprendre leur souffle, comme un temps mort avant la bataille. Le calcul est mauvais mais l'offre politique l'était encore plus, ne l'oublions pas. Le tragi-comique, la farce, annoncent souvent des périodes de réveil très dures. Il ne s'agit que de différer l'inévitable événement, de le reporter, plus loin, plus tard, le plus tard possible. Le problème étant que durant ce différé, loin de se dissoudre, l'indéfectible réel prend encore de la puissance et de l'ampleur, se charge de tout le négatif qu'on refusait, et plus, qu'il se contracte et bande ses muscles pour mieux se déchaîner ensuite. Le Président des bisous devrait renforcer le plan Vigi-picrate, avec distribution gratuite de rouge qui tache à la populace, parce que nous allons en avoir besoin dès qu'il aura avec ses copains les intermittents de la débâcle débarrassé la scène où ils interprètent laborieusement leur moderne mélofarce à coups de poses moralino-pompeuses.

Je ne sais pas si vous avez assisté à cette chose inouïe : les vœux de Caramel Hollande ! Tellement minables qu'on les aurait cru écrits par Sarkozy pour plomber définitivement son successeur. Misérable litanie atone débitée sur le ton impayable de celui qui s'imite lui-même, fasciné par son absence de reflet dans le miroir. Hollande, c'est un Mitterrand qui se serait vidé, qui aurait perdu toute sa force, son talent, sa séduction, un Mitterrand qui serait atteint d'une maladie dégénérative, creusé par la bulle rose d'un Malabar sur le point d'éclater à la face d'une adolescente boutonneuse et percée aux naseaux. Quand je vois Caramel Hollande à la télévision, j'éprouve le même sentiment que lorsque je vois ces adultes, de plus en plus nombreux, écrire au stylo d'une écriture enfantine, informe, malhabile, et finalement débile. Que s'est-il passé ? Trop de Coca-Cola, trop de socialisme-à-la-française, trop d'ennui, 24° dans la chambre à coucher, les femmes, une psychanalyse interrompue, une carrière rentrée de poète ? Ou peut-être un fabuleux humour au quatorzième degré ? Ce qui réjouit le plus dans tout ça, ce sont les quelques défigurants appointés qui viennent régulièrement nous expliquer, d'un ton melliflu et doctoral, que « François Hollande est extrêmement intelligent ». Il doit être question de cette sorte d'intelligence qui met un point d'honneur à passer inaperçue, j'imagine, en quoi elle est encore plus intelligente que l'intelligence normale de ceux qui sont intelligents juste comme ça, un peu par hasard on va dire.

Mais voici que Caramel Hollande s'est mué aujourd'hui, nous dit-on de toute part, en Chef de guerre. Figurez-vous que la France, la France éternelle, la France terre-d'asile et le-pays-des-droits-de-l'homme, la France, donc, ce grand pays qui fiche la frousse à tout ce qui bouge au Lichtenstein, la France est en guerre, et Caramel Hollande a enfourché son destrier et mis son armure pour aller défendre le Mali gentil attaqué par de méchants terroristes qui nous menaceraient aussi si Captain François n'avait pas dégainé le Phallus piquant qui lance des étincelles, celui qu'on remet à tous les présidents de notre grand pays menaçant pour les méchants. Vous ne connaissez pas le Mali ? Peut-être mais le Mali nous connaît, lui. Le Mali a dit, même : « Au secours la France ! » On croit savoir qu'il aurait même dit : « Au secours, Captain François, viens bouter un coup chez nous où y a des indésirables qui vont venir chez toi si tu viens pas les bouter chez moi. » Tout juste ce que Caramel Hollande attendait pour montrer à tous les Français qui c'est qu'ils avaient élu, les Français. Françaises, Français, vous avez, eu, bien raison de, me faire président. Moi-même, je, ne le savais pas, que vous, aviez raison, mais, devant, l'adversité adverse, je vais, devoir, me transfigurer et, m'entraîner au, tir à l'arc, c'est Valou, qui, va être, contente, et même Ségo, je, vais, l'impressionner, et peut-être, même Brigitte, Bardot et la, grosse Allemande qui m'entraîne, sur, les tapis rouges. Françaises, Français, Homos, Sensibles, Jeunes, regardez bien, la télé, on va, me voir, souvent, dans les, jours qui, viennent. Bon, j'y vais. A, plus. Bisous !

Caramel Hollande, c'est un peu la Big Mother qu'on n'attendait plus, la copine des anti-patriarches, celle qu'on n'attendait plus parce qu'elle est partout, là, ici, maintenant, demain, et même parfois hier. Tout le monde se demandait, depuis quelques années, pourquoi l'ascenseur social était en panne. Mais c'est pourtant simple ! Il est en panne parce que Big Mother a voulu le prendre, pour voir comment ça faisait de prendre l'ascenseur social avec ses copines, et que, depuis ce jour-là, l'ascenseur il ne peut plus monter, parce que Big Mother, sauf son respect, elle est un peu en surpoids. Seulement l'ascenseur social, il est poli, alors pour ne pas avoir l'air de discriminer, il se tait. Il se tait et il ne bouge plus. Parfois, même, il descend un peu, juste un peu, d'un étage ou deux, pour se soulager le dos, qu'il commence à avoir un peu cassé. Pour l'instant, les câbles n'ont pas encore lâché. Et il existe même des gens qui continuent à vouloir monter, les masos !