mercredi 4 novembre 2009

La Pravda

Christine Villemin a été libérée ! Pour l'instant… La France n'est pas vraiment certaine de tenir là une infanticide "sublime forcément sublime" comme l'appelle cette vieille peau pourrie de Marguerite Duras qui écrit — c'est l'événement du jour — un grand article dans la Pravda de Serge July. Le gros gauchiste se régale de toute l'affaire. Ça lui rappelle l'histoire du notaire de Bruay-en-Artois accusé à tort d'avoir trucidé la petite Brigitte Dewaere et sur laquelle l'acharné prolétarien July a bâti toute sa sinistre carrière de "journaliste". Aujourd'hui, ça doit bien le faire bandocher, le feuilleton antique de Lépanges. Assoiffé comme il est, July boirait verre après verre toute l'eau de la Vologne qu'il ne se désaltérerait pas. Chaque fois que July prend la plume, on dirait qu'il vient de l'arracher du cul d'un corbeau. Il touille la merde d'Épinal avec et l'écrase sur ses grandes pages déjà souillées de références douteuses (Roland Barthes et Cie…). Mais tout cela n'est rien encore à côté du "texte" que la Prix Goncourt 1984 a daigné donner à Libération… L'Écrivaine numéro un de la minuitée sans suc se lance dans l'actualité ! Le vagin retrousse ses babines ! Marguerite se mouille ! Débile, forcément débile !

Je lis effaré ces quatre pages de conneries culottées. Cette vieillarde pontifiante est allée faire sous elle sur le terrain. C'est du joli. Il va sans dire que ce n'est pas écrit. Ça fait « bien écrit ». L'intellote prend conscience de se temps. La conne enquête. Elle rôde autour de la bicoque au crime, bien enfoncée dans son col roulé de mémère éthylique. On la voit bien avec son intelligence à la main comme une loupe, arpentant les entours du chalet vosgien ! Il ne lui manque que le chapeau à carreaux, à Sherlock Duras ! Moi, j'aurais été le petit Grégory, voir s'approcher de moi un monstre comme Marguerite Duras m'aurait fait me foutre à l'eau tout seul ! Y a-t-il femme de lettres plus grotesquement vaniteuse que la Duras ? Je téléphone à Serge July, je lui dis que je ne ferai pas l'article. Et puis à deux heures du matin je commence à l'écrire. Coquette cacochyme ! C'est à partir de ce moment qu'"au-delà de la raison", elle rédige son delirium inconséquent. Elle fait sa Simenon, elle se repasse le film, c'est tout juste si elle n'étrangle pas elle-même l'enfant mieux que l'assassin ! Ah, qu'elle se met bien dans la peau de "Christine V." (l'initiale, quel chic !) ! Elle la comprend à mort de l'intérieur ! C'est impressionnant comme Marguerite D. compatit au malheur psychologique qui a poussé Christine V. à devenir forcément sublime ! C'est là qu'elle a cette phrase à dégueuler partout : Christine V. innocente qui peut-être a tué sans savoir comme moi j'écris sans savoir. Alors ferme ta gueule, salope ! C'est très grave ce culot inouï. Personne d'autre que madame Duras ne pourrait se permettre, en pleine affaire complexe, de "charger", sous couvert d'intuitive littérature, une accusée à ce point. Et July trouve ça parfait. Marguerite Duras dit tout haut ce que nous pensons tout bas (comme Le Pen, alors ?). Si haut que toute la justice snobée risque fort d'être influencée sur le sort à réserver à la mère V. Et si elle n'était pas le personnage rêvé de la Duras ? Tout ça pour faire monter le fantasme de l'infanticide, si présent dans l'"œuvre" et la trogne de cette haineuse pocharde femelle ! Pour Marguerite Duras, c'est normal d'être une mère monstrueuse puisque la maternité est monstrueuse en soi. La vraie maman tue. Quelle dégueulasserie ! J'aime le crime, dit-elle, et ça suffit à July pour l'envoyer à Lépanges, s'approprier l'affaire en cours, trancher dans le vif pour tous les juges et tous les flics, ramener sa fraise et l'écraser sur tous les cadavres chauds… Christine Villemin est devenue une héroïne de l'écriture de l'auteur de l'Amant, dit le patron de presse. Il s'agit d'un écrivain en plein travail, fantasmant la réalité en quête d'une vérité qui n'est sans doute pas la vérité, mais une vérité quand même, à savoir celle du texte écrit. Ce n'est de toute évidence pas la vérité de Christine Villemin, ni vraiment celle de Marguerite Duras, mais celle d'une femme "sublime, forcément sublime" flottant entre deux langages…

Comment peut-on supporter tant de légèreté cynique ? Grégory doit se retourner dans sa vase… Tant de mauvaise littérature (car tout est là aussi), servie en alibi à la manip minable de deux notables du pouvoir intellectuel ! En effet, l'article de la Duras est scandaleux (plus encore que celui de Barthes sur Dominici, son modèle) mais pas comme l'entend July. Il est scandaleux parce qu'il se fait passer pour scandaleusement immoral alors qu'il est scandaleusement moral. Toute la morale gauchiste — la même que celle que July utilisait contre Me Leroy — est là pour caresser les esprits dans le sens du poil sale. Faire semblant de comprendre et de pardonner (on n'a pas rangé la guillotine pour rien) le crime (Il arrive que les femmes n'aiment pas leurs enfants) pour mieux en renverser les effets sur le plan social. Et si, au passage, Marguerite se paie une petite autopsychanalyse sur le dos de la présumée innocente-infanticide, c'est encore mieux ! Et voilà le travail ! Duras insiste bien, et sans talent, sur la "victime" des circonstances, la femme au foyer martyre, poussée la médiocrité quotidienne à noyer son gosse. C'est pas sa faute : Christine V. n'était pas assez "à gauche". À la fois l'accuser publiquement, de toute son autorité d'"écrivain", et l'innocenter "politiquement" par la force des choses tristes.

Cette masturbation sans plaisir est une des prestations les plus répugnantes de l'époque. Le féminisme hystérique de Duras (et de toutes ses copines soixante-huitardes qu'on devine derrière) va si loin qu'elle excuse la prétendue mauvaise mère pour mieux accuser — c'est le but — le mari, véritable assassin. Ça ne lui suffit pas que Jean-Marie Villemin (elle ne le cite jamais, elle l'appelle "cet homme") ait tué son cousin (encore un présumé innocent) : son vrai crime c'est d'être un homme. D'être le mari d'une femme sublime et de la laisser faire la vaisselle ! Regardez bien autour de vous : quand les femmes sont comme celles-ci, inattentives, oublieuses de leurs enfants, c'est qu'elles vivent dans la loi de l'homme.

Duras y arrive tout doucement : si Christine avait eu le courage — ou l'occasion plutôt — de s'évader de cette "prison de liberté", elle n'aurait pas eu besoin de dégrégoryser son petit garçon ! C'est ça que ça veut dire. Pauvre vagin vosgien… Elle a reporté sa violence contre son mari sur son fils. Et voilà l'ignoble Marguerite fanée — qui n'a jamais pu faire bander qu'un faux Chinois il y a cinquante ans — qui lâche un de ses plus moisis pétales : Aucun homme au monde ne peut savoir ce qu'il en est pour une femme d'être prise par un homme qu'elle ne désire pas. La femme pénétrée sans désir est dans le meurtre. Tout s'explique donc ! Elle le dit et le redit, elle ne se lasse pas de décaler tous ces crimes. La victime c'est la mère ; le meurtrier c'est le père, mais pas de son enfant, ni de son cousin : de sa femme ; et l'enfant mort — ça lui brûle les grandes lèvres de le dire, mais elle n'ose pas — ce n'est pas Grégory c'est celui que Christine V. attend en ce moment ! Dans son ventre, le prochain, voilà le plus cruel assassinat : celui qui consiste à à faire un enfant à sa femme quand on en est l'odieux mari !

Résumé : Chistine V. est sublime parce qu'elle est innocente d'être coupable. Tous les maris sont des ordures, et les enfants n'ont pas à exister. Toute justice est donc inutile. Dans cette affaire, on a touché la monstruosité de l'innocence. On est allé jusqu'à "la couche derrière le mal". Fin. Les intertitres sont de la rédaction.


On dit que je suis haineux ? Mais c'est ça la haine, la vraie haine de tout : des femmes, des hommes, des enfants, du sexe, de l'amour, de la maternité, de la paternité, de la littérature, de la réalité, des Vosges et de la vérité. C'est la haine de la vie et même la haine de la mort ce qui, pour un écrivain, est la lâcheté suprême, celle de l'être détestable qui n'a pas le courage de se détester lui-même.

(Marc-Édouard Nabe, Journal intime, tome 2, Tohu-Bohu, pages 1154 et suivantes)