— Balazuc, Saux-et-Pomarède, Vaux-sur-mer, Crépy-en-Valois, Pessines, Chomérac, Orsinval, Téthieu, Gretz-Armainvilliers, Locminé, Buthiers, Gahard, Lormont, La Farlède, Donzère, Challans, Échillais, Prades, Plouëc-du-Trieux, Delle, Trédion, Guignes, Mordelles…
— C'est quoi ?
— Des noms. Des noms de passage. Des bleds que personne ne connaît. Mais il y a des gens qui habitent là, qui vivent là.
— Et alors ?
— Je ne sais pas. Ça ne t'émeut pas ?
— Non, non, vraiment pas. Je sais bien, qu'il y a des bleds que je ne connais pas et que des gens que je ne connais pas habitent dans ces bleds que je ne connais pas. En quoi ça devrait m'émouvoir ? Je vois vraiment pas.
— C'est la France, tu comprends. C'est la France dont on n'entend jamais parler.
— Si on n'en parle pas, c'est parce qu'il ne s'y passe rien.
— Mais précisément ! C'est ça ! C'est ce que j'essaie de te faire comprendre. Là où il ne se passe rien, c'est le pays, c'est le vrai pays.
— C'est tordu, ton truc. On devrait s'intéresser à des endroits où il ne se passe rien ? c'est aberrant, je suis désolée. En quoi ils sont plus vrais que nous, tu peux m'expliquer ? C'est des trous où les gens sont à demi-morts, oui. Je ne vois aucune vérité là-dedans. Occupe-toi plutôt de mon trou. Tu seras pas déçu.
— Toi aussi tu es de passage, ma chérie.
— N'importe quoi. C'est les hommes, qui passent. Nous on bouge pas. On écarte les jambes et on bouge pas. C'est nous, le vrai pays.