Nous nous promenions. Je ne réponds rien. Un radis noir ! Nous sommes dans un pays libre. « Je vais marcher. » Et puis hier, elle me montre son test. Je crois que j'ai fait le tour de la question. Je ne m'y attendais pas du tout. Il y avait dix centimètres de trop. Pourtant, elle était plutôt douce. Elle l'a caressé un peu, et a dit : « Quel gros trou du cul ! » Mais comme le danger est un élément essentiel de l'érotisme… Quelle funeste erreur ! La tendresse crée de la tendresse, par contagion. J'en aurais pleuré, à chaque fois que j'étais à son contact. « Ah oui, tiens, il faudrait que j'essaie. » J'ai aimé cet aller-retour à Nîmes. Il faisait un temps superbe. Venteux, chaud, un air très sec. Je dois avouer que j'aurais donné cher pour que ce moment dure, mais mon élève allait arriver d'un instant à l'autre. J'ai un corps, moi, monsieur, et ce corps va vous convaincre. Elle a voulu qu'on marche. On a marché. Quoi de plus naturel, en somme ? La maîtrise est pour moi parfaitement antinomique de l'érotisme. C'est donc ça, une vulve ? Le destin a donc choisi pour moi. Elle me décrivait précisément la manière dont elle s'imaginait entrer chez moi, tous les sens en alerte, avec autant de ferveur que de timidité, la manière qu'elle aurait de voir ce qui l'entourait. Si. Elle a vu mon bureau. « Mais je le connais ! » C'est le contraire, qui est anormal. Au moins nous avions un point sur lequel nous reposer. (Ici, faire son autocritique !) « Je ne sais pas si cela a été fait, c’est possible, mais il serait intéressant d’écrire un texte où l’auteur s’interrogerait longuement pour savoir s’il a envie de passer du temps avec le personnage dont il est tenté de parler. » La décision n'est jamais facile, pour moi, et l'appréhension qui m'étreint à cet instant m'est un délicieux poison. Pourtant, le silence était accablant. J'écoute le dernier mouvement de l'Aurore pour ne plus y penser. Dès avant son arrivée, les choses étaient claires. Ça m'a tout de suite énervé, qu'on puisse imaginer possible une chose pareille. Tout cela est sinistre, bien sûr, mais aussi cocasse. « Vous êtes le chirurgien de l'amour. Vos questions au sujet de la sexualité sont toujours techniques. Vous avez une vision technique du corps, pas seulement, mais la partie technique a beaucoup d’importance pour vous, et c’est loin d’être absurde. » Ne pas comprendre est ce qu'il y a de pire. Quelle effervescence ! Quel soleil ! Des corps partout. De la musique. Tout cela a eu lieu. Je m'en souviens. C'était un risque, tout de même, de me laisser voir son corps. Passer du temps avec un personnage, ce n'est pas facile. Combien de fois me suis-je senti comme l'escargot qui avance doucement ses antennes, et qui doit les rentrer précipitamment. Je la questionne donc par texto. « Tel que bonjour ? » Il ne sert à rien de dire à celui ou celle qui ne nous aime pas qu'on a jadis été jeune et beau. « Tu ne seras jamais un grand écrivain. » On devrait prendre des mesures, quand on est jeune. « Personnel jusqu'au déplaisir, libre jusqu'à froisser, sensible jusqu'au ridicule, imparfait au possible, mais moi assez vivement, c'est un assez joli résultat, il me semble ? » Les filles faciles sont ou très jeunes, ou très bêtes, ou supérieurement intelligentes. Elle a pour les éclats la passion des enfants. Toutes les barrières, toutes les frontières tombent, les unes après les autres. « Question de génération. » ll y a un emploi du temps. Il n'y a pas de détails, dans les relations humaines : tout vient à un moment ou à un autre sur le devant de la scène ; il suffit d'attendre. Les couples le savent bien. L'érotisme toujours oscille entre ces deux écueils. C'est peut-être pour cela que j'en ai tant besoin. Je me suis même demandé si mes tableaux, aux murs, ne pouvaient pas avoir été cause de son malaise. Sa froideur même m'excitait. Crève de solitude. C'est pourquoi les êtres pleins sont impossibles à aimer. Tout cela se lit dans la première phrase. « Je suppose que Vincent a dormi dans le canapé ? » Je ne peux pas lui donner tort. Elle paraissait mâchonner en secret quelque aliment indigeste, quelque viande rance et pimentée. Le cunnilingus, c'est d'abord l'odeur. La position du nez, juste au-dessus de la bouche, en vigie, plongeant vers elle, ne laisse aucun doute. « M'enfin ! Pas du tout ! » Le temps d'un gonzo sur Internet… Le temps de se branler. C'est le temps qui épaissit le sang qui bat aux tempes, qui lui donne cette violence sourde, et qui plonge les corps dans l'effroi (sans l'effroi, le sexe n'est rien). Pas besoin de goûter, on sait immédiatement si l'on aimera ou non. Je sais que ce que j'écris a l'air cruel, mais ça ne l'est pas.