vendredi 4 décembre 2020

Comment je suis devenu misogyne (2)

Ce qui m'a permis de devenir misogyne sur le tard est la part féminine très développée que je possède. Un homme entièrement viril se contente de ne rien comprendre aux femmes, et il vit très bien avec ça. Il les voit de l'extérieur, comme on regarde un chat, ou un tabouret. Il sait seulement qu'il peut arriver, avec beaucoup de difficultés, à s'en servir, ou à s'en faire accepter, mais comme il n'a pas accès du tout à leur esprit, il ne peut pas les haïr vraiment ; il ne sait même pas pourquoi il en a peur. Il s'asseoit sur le tabouret, et constate que celui-ci est bancal, mais il pense que c'est dans la nature du tabouret d'être bancal, et ne cherche pas plus loin. Et quand il se fait griffer par le chat, il croit que celui-ci s'amuse, ou qu'il a eu peur, en conséquence de quoi il le caresse avec plus de ferveur encore. 

Sans l'écrit, je veux dire sans la lecture de ce qu'écrit une femme dans un réseau social, par exemple, ou encore des textos ou des mails qu'elle nous adresse, jamais je n'aurais imaginé la profondeur du gouffre. Cette expérience a vraiment été une apocalypse. Plus moyen de revenir en arrière, après ça. Elles ne se rendent pas compte à quel point elles se révèlent, du moins je ne le crois pas, car sinon elles sont complètement cinglées. La seule chose dont je pense qu'elle peut s'apparenter un peu avec cette expérience des réseaux sociaux est l'observation d'une femme, en été, sur la plage, en train de lire son magazine, un stylo Bic à la main. 

Avec un peu d'expérience, on s'aperçoit qu'il est urgent, dès qu'un semblant de commerce s'établit avec une de ces créatures, de brûler ses vaisseaux, quoi qu'il puisse en coûter. Le plus tôt est le mieux, croyez-moi. Il faut à tout prix éviter de lui laisser le temps d'ignorer qui on est, et comment on se comporte en société, car elle aurait vite fait sinon d'imposer ses propres normes et coutumes que, bien sûr, elle juge universelles. Car les femmes sont, la plupart du temps, persuadées que la norme est en elles, comme l'utérus est dans leur ventre. Un utérus, une norme, comme on dit une voix, un vote ! Elles ne peuvent pas admettre qu'une norme soit, par définition, quelque chose d'extérieur à l'individu ; elles produisent de la norme comme elles produisent des ovules, et si jamais vous arriviez tout de même à le leur démontrer, elles vous rétorqueraient que c'est bien la preuve que la norme est une notion masculine, puisqu'elle prétend s'imposer à tous. La norme, c'est comme la syntaxe, c'est comme la politesse, ça se situe à l'extérieur de l'individu, et c'est ce qui est intolérable à la femme, car elle est l'individu par excellence — je parle bien sûr de la femme d'aujourd'hui, qui tend à s'affranchir de tous les déterminismes, et de toutes les contraintes, fussent-elles biologiques ou naturelles. Mon corps, mon utérus, mon bébé, mon homme, ma maison, ma piscine, mes varices, mes règles, mon sport, mon yoga, mon ressenti, tout lui appartient en propre, et en même temps, elle peut s'en débarrasser en dix minutes si ça lui chante. 

(…)