« Nouvelle, nouvelle, nouvelle est l'étoile du communisme, et en dehors d'elle il n'y a pas de modernité » (1920, Vladislav Vancura)
« La beauté d'un mot ne réside pas dans l'harmonie phonétique de ses syllabes, mais dans les associations sémantiques que sa sonorité éveille. De même qu'une note frappée au piano est accompagnée de sons harmoniques dont on ne se rend pas compte mais qui résonnent avec elle, de même chaque mot est entouré d'un cortège invisible d'autres mots qui, à peine perceptibles, corésonnent.
Un exemple. Il me semble toujours que le mot ensevelir enlève, miséricordieusement, à l'acte le plus effrayant son côté affreusement matériel. C'est que le radical (sevel) ne m'évoque rien alors que la sonorité du mot me donne à rêver : sève - soie - Ève - Èveline - velours ; voiler de soie et de velours. »
(X X, * ** ***)
« Pour trouver la réponse émotionnelle juste et appropriée, cependant, il faut être au moins un peu rusé. Un journaliste agressif de la radio française me demanda un jour si mon métier de pianiste ne souffrait pas du fait que je réfléchissais excessivement à la musique que je devais jouer. Je n'ai rien trouvé d'intelligent à dire sur le moment. J'aurais pu lui répondre, avec Diderot, que l'interprète dominé par sa passion n'est pas le plus efficace, mais plutôt le musicien qui paraît spontanément ému par la musique et se trouve néanmoins capable de manipuler ses propres sentiments pour susciter l'émotion du public. Tout pianiste sachant ce qu'est une tournée où il faut jouer le même concerto une douzaine de fois en quinze jours comprend l'importance d'une telle simulation de l'émotion et d'une telle capacité de la faire naître à volonté.
Certes, le savoir conduit tout aussi fréquemment à des interprétations plates et mal calculées qu'à de bonnes interprétations. Cependant, on soutient parfois que celles qui sont informées par la connaissance et la compréhension se situent à un autre niveau — plus élevé ou plus profond, c'est selon — que les interprétations instinctives ou irréfléchies. Je ne suis pas certain que cela soit juste, et la vérité exigerait, non de réfuter cette proposition, mais d'en inverser l'orientation. Ce sont peut-être les musiciens ayant déjà un sens réflexif de leur art qui sont amenés à justifier leur tempérament et leurs inclinations ex post facto. »
« Une grave erreur du début de la Sonate en si bémol mineur de Chopin est plus intéressante encore : dans toutes les éditions du XXe siècle, la reprise de l'exposition, selon une indication erronée, démarre au début de la cinquième mesure, alors qu'elle doit en réalité commencer dès la première mesure. (…) J'aimerais m'arrêter un peu sur la manière dont la faute fut admise un siècle et demi durant, et sur les résultats de mes essais de rectification (…).
Il est important de remarquer que la version courante est manifestement inepte. N'était le nombre de ceux qui ont cru à cette version, j'aurais affirmé qu'il est impossible d'imaginer que Chopin puisse être l'auteur de la modulation qui apparaît lorsque, à la fin de l'exposition, on reprend à partir de la cinquième mesure. En effet, il ne devrait pas être crédible qu'un musicien professionnel, quel qu'il soit, puisse faire preuve d'une aussi évidente incompétence. (…)
S'ils n'ont pas fait la bonne lecture, c'est qu'ils ont été incapables de la reconnaître même quand ils l'avaient devant les yeux (…).
En général, les éditeurs ont des ambitions plutôt modestes : ils travaillent à partir de l'apparence visuelle de chaque détail, sans s'interroger sur son sens mais seulement sur sa conformité avec d'autres détails dans la même pièce ou dans la même tradition. »
« Il est du devoir moral de l'interprète de choisir la version qu'il juge musicalement supérieure, quelle que soit l'intention clairement écrite du compositeur, mais il est aussi de la responsabilité morale du pianiste de parvenir à se convaincre que le compositeur savait ce qu'il faisait. »
(Y Y, * ** *** ****)
« Maintenant que la section du développement commence, je peux sortir fumer une cigarette. »
(Z Z)
Nous ne sommes pas des acharnés du sens,
mais tant de familiarité avec des significations erronées nous intrigue…
(Marianne Moore)
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