vendredi 24 janvier 2020

Andante


Il suffisait de refermer la porte pour que tout redevienne calme. Au loin s'agitent des fantômes. Je les regarde par la fenêtre. Ils discutent fébrilement, peut-être, ils s'affrontent, sans doute, ils se menacent, se congratulent, s'embrassent, se déchirent, se reconnaissent et donc s'excommunient. Des pans de murs entiers sont recouverts de leurs vociférations électroniques. Mais déjà s'éloigne la morale. Le bruit de leurs disputes n'arrive plus jusqu'à moi. La longue phrase de violon s'étire dans le soir qui vient. Par-delà la grande arche, et plus haut, on aperçoit la paix immuable et légère, dans son éternelle lumière. Un accord, qui semble infini, me prend et me porte : mes pensées se sont tues. J'observe sans y croire ce corps qui était le mien. Si je le reconnais, je n'en comprends déjà plus le fonctionnement. Les couleurs me parlent directement, je comprends qu'il ne s'agissait que d'une histoire racontée, une histoire parmi d'autres. Une histoire racontée dans une langue qui n'était pas la mienne.