— Je ne veux pas.
— Mais pourquoi, enfin ?
— Parce que, c'est comme ça.
— Mais c'est ridicule !
— Peut-être, mais je ne veux pas.
— Tu vas le regretter…
— Non.
— Mais si, bien sûr, tu vas le regretter… Je suis sûr que tu ne sais même pas pourquoi tu ne veux pas…
— Peu importe. Je ne veux pas, c'est tout.
— C'que tu peux être pénible, franchement !
— Je ne vois pas du tout pourquoi je devrais vouloir…
— Ni pourquoi tu ne veux pas…
— Ne t'en fais pas pour moi.
— Mais, au fait… Qu'est-ce que tu ne veux pas ?
— Je ne sais pas, mais je ne veux pas.
— Tu ne veux pas savoir ce que tu ne veux pas.
— Et je ne veux pas ce que je ne veux pas savoir.
— Tout va bien, donc.
— En quelque sorte, oui, tout va bien. Mais je ne veux pas le savoir.
— Savoir que tout va bien impliquerait une dégradation ?
— Et comment ! La science nouvelle ne peut exister que dans l'ignorance et le refus.
— Quelle science ? Et pourquoi nouvelle ?
— La science de l'amour, qui est toujours nouvelle.
— Inconcevable ?
— Solitaire et chic.
— Mais c'est une contradiction. L'amour ne peut se concevoir dans la solitude !
— Quelle erreur !
— « Le chic, c'est le pied-de-poule, et de pouvoir dire : “Non, Madame.” »
— Voilà.
— Tu ne veux pas alors que tu pourrais.
— Parce qu'elle cesse d'exister si je ne la contredis pas.
— Et ainsi tu passes à côté de ta vie…
— Passer à côté de ma vie, c'est vivre. C'est seulement sur les côtés, que ma vie est intéressante.
— Tu remplis les marges et tu laisses la page vide.
— La marge a pris tellement d'importance que la page a été engloutie.
— Personne ne comprendra.
— C'est le but.
— Je ne comprends pas.
— Tu ne veux pas.
— Non.
— Tu vois. Tu es comme moi.
— …
— Oui, Monsieur.
— Tu vas décrocher ?
— Non.
— Va chier.