L'île est promise à l'engloutissement. Cela peut arriver demain, dans un mois, dans quinze ans, mais il est certain, d'après les scientifiques, que bientôt cette île aura disparu de la surface de la terre. Nous sommes donc allés nous installer là, car le prix des maisons est dérisoire et l'on peut y trouver une demeure magnifique, avec jardin et vue sur la mer, pour le prix d'un misérable studio au fin fond de la Creuse. Demain n'existera peut-être pas, c'est incontestable et un peu effrayant, mais qu'il n'y ait point de lendemain, jamais, n'est-il pas de toute manière le lot de l'humanité tout entière ? Anne prétend que s'il n'y a pas plus de chances que nous échappions à la catastrophe que de gagner au Loto, il n'y en a pas moins non plus. Non, la seule question qui nous taraude, lorsque nous profitons de notre solitude bénie et que nous cherchons à meubler notre farniente, c'est celle-ci : comment se fait-il que le prix de l'immobilier ne chute pas brutalement à San Francisco ? Pourquoi si peu de monde ici et tant là-bas ?
Avoir un congélateur est indispensable, car nous ne pouvons que rarement nous rendre sur le continent pour faire les courses, mais ce congélateur est devenu un sujet de plaisanterie entre nous. Posséder un instrument qui sert à conserver les aliments quand nous savons que peut-être nous n'aurons plus à nous nourrir dans trois jours nous apparaît comme un fait cocasse. La question de l'assurance aussi nous a beaucoup réjoui. Les assurances d'habitation sont obligatoires, mais les compagnies ne sachant pas quoi assurer, ici, on peut lire des contrats d'une poésie merveilleuse. L'un de nos grands plaisirs, c'est à la nouvelle année. Nous recevons énormément de cartes de vœux et de coups de téléphone. Personne n'oublie de nous souhaiter une excellente année, comme si le fait de nous présenter ces vœux traditionnels était en mesure de nous préserver de l'inéluctable. Anne et moi imaginons l'angoisse et l'appréhension avec laquelle, chaque année, nos amis mettent un point d'honneur à ne pas couper à cette pénible épreuve : nous écrire ou nous téléphoner. Il faut bien avouer que cela nous divertit beaucoup.
Les rares personnes qui sont venues s'installer ici sont soit des solitaires d'un certain âge, soit, comme nous, des couples sans enfants. Mais comme toute règle a ses exceptions, il se trouve une famille parmi la petite communauté ilienne. Peu d'entre nous leur adressent la parole, car on estime ici que leur présence parmi nous est une sorte de provocation, et qu'ils donnent une mauvaise image de nous tous. Anne et moi, au contraire, avons beaucoup d'affection pour cette famille, même si, il est vrai, nous les trouvons assez étranges. Les enfants, au nombre de quatre, ne parlent à personne en dehors du cercle familial. Pourtant on voit bien qu'ils sont tout à fait normaux, et même instruits, car les parents leur donnent semble-t-il une excellente éducation. En passant devant leur domicile, quand nous nous promenons, nous pouvons parfois les entendre discuter entre eux, au jardin, et nous sommes toujours très favorablement impressionnés par leur niveau de culture et de langue. Parmi les raisons qui font qu'ils sont peu aimés, je me demande s'il n'y a pas cette question de la culture, qui est comme un reproche silencieux à tous adressé : pourquoi se donner tout ce mal, pourquoi accorder tant de soins à l'éducation donnée aux enfants ?
Anne et moi avons baptisé notre maison. Nous l'avons appelée "Vivant", en hommage bien sûr à Vivant Denon, que nous aimons tous les deux. Il nous semblait amusant de donner, à une maison qui bientôt serait engloutie au fond de la mer, le prénom (et quel prénom !) d'un homme qui avait écrit un ouvrage dont le titre était Point de lendemain. Sur ce point de l'engloutissement, il a été en vive concurrence avec Claude Debussy, mais Vivant l'a emporté au troisième tour d'une bataille navale très disputée. Nous avons la télévision, le téléphone, Internet et beaucoup des commodités de la vie moderne. On nous livre le courrier une fois par semaine bien qu'on nous ait fait comprendre récemment qu'il n'en serait pas toujours ainsi. Nous avons un médecin, très compétent, bien qu'un peu âgé, qui a eu la bonne idée de venir s'installer avec son épouse, une ancienne infirmière. Nous n'avons pas de police mais ça tombe bien car nous n'en avons pas besoin. Anne me dit parfois en riant que nous allons finir comme les dix petits nègres d'Agatha Christie, à la différence près que notre Hercule Poirot à nous aura une nageoire et des écailles. En parlant de poisson, Anne a remarqué que sur l'île, personne n'en mange. Ici on est soit carnivore soit végétarien. Pour les œufs, chaque famille possède ses propres poules, et pour le pain, chacun se débrouille, sauf l'écrivain, pour qui une vieille femme le prépare deux fois par semaine. Ah oui, j'allais oublier un détail qui a son importance à mes yeux : tout le monde ici est catholique. Je ne crois pas qu'il ait existé un quelconque plan qui soit à l'origine de cela, non, mais le fait est là, même si nous n'avons pas de prêtre dans la communauté.
Nous avons aussi un compositeur, paraît-il. Je dis "paraît-il" car personne ne le connaît ni n'a jamais entendu une de ses œuvres. Il est très possible qu'il ne soit pas plus compositeur que je ne suis plombier, mais personne ici ne songe à s'en inquiéter. Qu'importe, après tout. Il ne cherche pas la publicité, c'est le moins qu'on puisse dire, et c'est précisément cela qui nous plaît. On le voit souvent, vers la fin de l'après-midi, immobile face à l'océan, assis sur sa petite chaise pliante, semblant écouter je ne sais quoi, ou attendre je ne sais qui. Personne ne le dérange dans ces moments-là. C'est "le compositeur", et un compositeur, ça ne se dérange pas, c'est comme ça. En règle générale, c'est ce que j'aime tellement ici, dans notre petite communauté. Les rôles sont fixés une fois pour toutes, on ne revient pas là-dessus, on n'en discute pas, mais en même temps ces rôles n'impliquent pas grand-chose, sauf peut-être pour le médecin. Chacun est ceci ou cela, mais on n'aurait pas idée d'aller lui demander des comptes et de le tenir pour responsable de quoi que ce soit. Ce sont en somme plus des rôles que des fonctions. Sans doute que la possibilité que demain nous ne soyons plus là a-t-elle creusé la réalité sociale, l'a-t-elle évidée, trouée, débarrassée de tout son sérieux. Être ceci ou cela n'a pas beaucoup de conséquences. Sur l'île, le tragique léger a remplacé le sérieux lourd, c'est la principale qualité de cet endroit, en sus d'une absence presque totale de bruits inutiles.
Engloutissement : 1. « Pendant quelques minutes l'engloutissement du potage protégea l'hébétement de Maurice, qui oubliait de déplier sa serviette. » 2. « Dans cet engloutissement des deux cents millions, il fallait bien, si des poches s'étaient vidées, que d'autres se fussent emplies. » 3. « L'engloutissement soudain du navire ne laissa point le temps de jeter les chaloupes en mer. »
Il y a tout de même une question que tout le monde a à l'esprit, bien qu'on n'en parle jamais. Quand viendra la catastrophe, comment réagirons-nous ? Je veux dire, comment réagira chacun en particulier, car nous n'avons aucun plan, aucune consigne, aucune politique, à ce sujet. On pourrait d'ailleurs poser la question en ces termes : existera-t-il, au jour J, une communauté, ou seulement des individus face à leur destin ? Sommes-nous liés les uns aux autres par le fait-même que nous nous soyons établis ici ? Serais-je, moi, responsable de ce qui arrive à mon voisin ? Là-dessus j'imagine que les avis divergent.
Venir ici, c'était choisir une autre temporalité, se retirer du temps social commun, se mettre en marge du devenir normal, c'était un peu comme décider que nous ne voulions pas que les saisons soient un éternel recommencement. Les hommes, en règle générale, attendent la mort en pensant qu'elle seule va leur révéler le sens de la vie. C'est dans cette longue attente incertaine, dans cette patiente construction-déconstruction, qu'ils placent l'espoir enfantin de ne pas avoir vécu en vain. Le feu de la mort les brûle et les réchauffe tout à la fois, et ils préfèrent laisser au destin biologique la charge de la preuve. Nous faisons au contraire le pari que même un printemps unique peut suffire à vivre vraiment, fondé et bordé qu'il est par le gouffre et l'insu. Je crois que tous ici nous sommes des amoureux du Temps, de son mystère terrible. Sur les objets en métal précieux, on trouve un poinçon qui en certifie la qualité. C'est ce qu'on appelle le "titre". Depuis 1838, la Minerve indique la quantité de métal précieux que contient un objet en argent. Si la minerve est placée dans un octogone et accompagnée du chiffre 1, l'argent est pur à 95% (24 carats). Si elle placée dans un ovale tronqué et accompagnée du chiffre 2, l'argent n'est pur qu'à 80 % (19 carats). S'installer sur l'île, c'est comme choisir de vivre à 24 carats au lieu de 19. Évidemment, ç'a un prix. Le métal précieux, c'est le Temps. On en a sans doute moins, mais il est plus précieux.
Vivre de cette manière implique qu'on ait déjà fait ses adieux au monde et à ceux qu'on aime, puisqu'on sait bien qu'on n'aura pas le temps de se préparer à la mort, que "mettre ses affaires en ordre" est un luxe qu'on ne connaîtra pas. On n'aura pas non plus le temps de réparer quoi que ce soit, ce qui rend les disputes et les conflits bien plus difficiles à supporter, et ce qui oblige, paradoxalement, à toujours envisager l'outre, l'après, car nous savons bien que le définitif n'est pas de l'ordre de l'humain, c'est la raison pour laquelle la mort ne peut être qu'une sortie du temps, car le temps et l'humain ont passé ensemble un contrat inviolable. Depuis que nous sommes sur l'île, écouter de la musique, par exemple, est devenu une activité quasiment sacrée, puisque chaque œuvre écoutée peut se révéler être la fameuse "œuvre qu'on aura écoutée juste avant de mourir", la brise au sel subtil qui nous brûlait aux lèvres…
Attendre : [L'idée suggérée est celle d'un simple écart temporel, à laquelle se joint habituellement l'idée implicite d'un lieu où se trouve le sujet] Rester en un lieu, l'attention étant fixée sur quelqu'un ou quelque chose qui doit venir ou survenir.
Cette définition décrit parfaitement notre vie sur l'île. Nous attendons. L'attente et la vie se confondent. En réalité, elles se confondent en chaque être humain, mais il fait généralement en sorte de ne pas le savoir, alors qu'au contraire nous rendons cette attente sensible, active, essentielle. Ce qu'il appelle vivre est justement cette tension perpétuelle mise à ne pas savoir, à ne pas sentir qu'il est en train d'attendre la mort qui vient. Cette attente consciente, c'est le poinçon du Temps, c'est son titre. Au lieu de chercher à désinscrire la mort de la vie, nous cherchons à l'y graver avec plus de force. Le Temps est à la fois la malédiction et le luxe suprême de l'homme. Enfin, je crois… Mais peut-être, après tout, que ce qui attire nos compagnons sur l'île est seulement le prix de l'immobilier. C'est même le plus probable. Remettons ce quatuor de Schumann, veux-tu, et viens près de moi, tout près.
Anne et moi avons baptisé notre maison. Nous l'avons appelée "Vivant", en hommage bien sûr à Vivant Denon, que nous aimons tous les deux. Il nous semblait amusant de donner, à une maison qui bientôt serait engloutie au fond de la mer, le prénom (et quel prénom !) d'un homme qui avait écrit un ouvrage dont le titre était Point de lendemain. Sur ce point de l'engloutissement, il a été en vive concurrence avec Claude Debussy, mais Vivant l'a emporté au troisième tour d'une bataille navale très disputée. Nous avons la télévision, le téléphone, Internet et beaucoup des commodités de la vie moderne. On nous livre le courrier une fois par semaine bien qu'on nous ait fait comprendre récemment qu'il n'en serait pas toujours ainsi. Nous avons un médecin, très compétent, bien qu'un peu âgé, qui a eu la bonne idée de venir s'installer avec son épouse, une ancienne infirmière. Nous n'avons pas de police mais ça tombe bien car nous n'en avons pas besoin. Anne me dit parfois en riant que nous allons finir comme les dix petits nègres d'Agatha Christie, à la différence près que notre Hercule Poirot à nous aura une nageoire et des écailles. En parlant de poisson, Anne a remarqué que sur l'île, personne n'en mange. Ici on est soit carnivore soit végétarien. Pour les œufs, chaque famille possède ses propres poules, et pour le pain, chacun se débrouille, sauf l'écrivain, pour qui une vieille femme le prépare deux fois par semaine. Ah oui, j'allais oublier un détail qui a son importance à mes yeux : tout le monde ici est catholique. Je ne crois pas qu'il ait existé un quelconque plan qui soit à l'origine de cela, non, mais le fait est là, même si nous n'avons pas de prêtre dans la communauté.
Nous avons aussi un compositeur, paraît-il. Je dis "paraît-il" car personne ne le connaît ni n'a jamais entendu une de ses œuvres. Il est très possible qu'il ne soit pas plus compositeur que je ne suis plombier, mais personne ici ne songe à s'en inquiéter. Qu'importe, après tout. Il ne cherche pas la publicité, c'est le moins qu'on puisse dire, et c'est précisément cela qui nous plaît. On le voit souvent, vers la fin de l'après-midi, immobile face à l'océan, assis sur sa petite chaise pliante, semblant écouter je ne sais quoi, ou attendre je ne sais qui. Personne ne le dérange dans ces moments-là. C'est "le compositeur", et un compositeur, ça ne se dérange pas, c'est comme ça. En règle générale, c'est ce que j'aime tellement ici, dans notre petite communauté. Les rôles sont fixés une fois pour toutes, on ne revient pas là-dessus, on n'en discute pas, mais en même temps ces rôles n'impliquent pas grand-chose, sauf peut-être pour le médecin. Chacun est ceci ou cela, mais on n'aurait pas idée d'aller lui demander des comptes et de le tenir pour responsable de quoi que ce soit. Ce sont en somme plus des rôles que des fonctions. Sans doute que la possibilité que demain nous ne soyons plus là a-t-elle creusé la réalité sociale, l'a-t-elle évidée, trouée, débarrassée de tout son sérieux. Être ceci ou cela n'a pas beaucoup de conséquences. Sur l'île, le tragique léger a remplacé le sérieux lourd, c'est la principale qualité de cet endroit, en sus d'une absence presque totale de bruits inutiles.
Engloutissement : 1. « Pendant quelques minutes l'engloutissement du potage protégea l'hébétement de Maurice, qui oubliait de déplier sa serviette. » 2. « Dans cet engloutissement des deux cents millions, il fallait bien, si des poches s'étaient vidées, que d'autres se fussent emplies. » 3. « L'engloutissement soudain du navire ne laissa point le temps de jeter les chaloupes en mer. »
Il y a tout de même une question que tout le monde a à l'esprit, bien qu'on n'en parle jamais. Quand viendra la catastrophe, comment réagirons-nous ? Je veux dire, comment réagira chacun en particulier, car nous n'avons aucun plan, aucune consigne, aucune politique, à ce sujet. On pourrait d'ailleurs poser la question en ces termes : existera-t-il, au jour J, une communauté, ou seulement des individus face à leur destin ? Sommes-nous liés les uns aux autres par le fait-même que nous nous soyons établis ici ? Serais-je, moi, responsable de ce qui arrive à mon voisin ? Là-dessus j'imagine que les avis divergent.
Venir ici, c'était choisir une autre temporalité, se retirer du temps social commun, se mettre en marge du devenir normal, c'était un peu comme décider que nous ne voulions pas que les saisons soient un éternel recommencement. Les hommes, en règle générale, attendent la mort en pensant qu'elle seule va leur révéler le sens de la vie. C'est dans cette longue attente incertaine, dans cette patiente construction-déconstruction, qu'ils placent l'espoir enfantin de ne pas avoir vécu en vain. Le feu de la mort les brûle et les réchauffe tout à la fois, et ils préfèrent laisser au destin biologique la charge de la preuve. Nous faisons au contraire le pari que même un printemps unique peut suffire à vivre vraiment, fondé et bordé qu'il est par le gouffre et l'insu. Je crois que tous ici nous sommes des amoureux du Temps, de son mystère terrible. Sur les objets en métal précieux, on trouve un poinçon qui en certifie la qualité. C'est ce qu'on appelle le "titre". Depuis 1838, la Minerve indique la quantité de métal précieux que contient un objet en argent. Si la minerve est placée dans un octogone et accompagnée du chiffre 1, l'argent est pur à 95% (24 carats). Si elle placée dans un ovale tronqué et accompagnée du chiffre 2, l'argent n'est pur qu'à 80 % (19 carats). S'installer sur l'île, c'est comme choisir de vivre à 24 carats au lieu de 19. Évidemment, ç'a un prix. Le métal précieux, c'est le Temps. On en a sans doute moins, mais il est plus précieux.
Vivre de cette manière implique qu'on ait déjà fait ses adieux au monde et à ceux qu'on aime, puisqu'on sait bien qu'on n'aura pas le temps de se préparer à la mort, que "mettre ses affaires en ordre" est un luxe qu'on ne connaîtra pas. On n'aura pas non plus le temps de réparer quoi que ce soit, ce qui rend les disputes et les conflits bien plus difficiles à supporter, et ce qui oblige, paradoxalement, à toujours envisager l'outre, l'après, car nous savons bien que le définitif n'est pas de l'ordre de l'humain, c'est la raison pour laquelle la mort ne peut être qu'une sortie du temps, car le temps et l'humain ont passé ensemble un contrat inviolable. Depuis que nous sommes sur l'île, écouter de la musique, par exemple, est devenu une activité quasiment sacrée, puisque chaque œuvre écoutée peut se révéler être la fameuse "œuvre qu'on aura écoutée juste avant de mourir", la brise au sel subtil qui nous brûlait aux lèvres…
Attendre : [L'idée suggérée est celle d'un simple écart temporel, à laquelle se joint habituellement l'idée implicite d'un lieu où se trouve le sujet] Rester en un lieu, l'attention étant fixée sur quelqu'un ou quelque chose qui doit venir ou survenir.
Cette définition décrit parfaitement notre vie sur l'île. Nous attendons. L'attente et la vie se confondent. En réalité, elles se confondent en chaque être humain, mais il fait généralement en sorte de ne pas le savoir, alors qu'au contraire nous rendons cette attente sensible, active, essentielle. Ce qu'il appelle vivre est justement cette tension perpétuelle mise à ne pas savoir, à ne pas sentir qu'il est en train d'attendre la mort qui vient. Cette attente consciente, c'est le poinçon du Temps, c'est son titre. Au lieu de chercher à désinscrire la mort de la vie, nous cherchons à l'y graver avec plus de force. Le Temps est à la fois la malédiction et le luxe suprême de l'homme. Enfin, je crois… Mais peut-être, après tout, que ce qui attire nos compagnons sur l'île est seulement le prix de l'immobilier. C'est même le plus probable. Remettons ce quatuor de Schumann, veux-tu, et viens près de moi, tout près.