La vie des organes est passionnante, quand on l'observe en curieux, en rêveur ou en savant, mais dès qu'on doit en prendre soin, dès qu'on commence à ne plus vivre que pour eux, ils nous deviennent odieux, car la vie qui naguère était une occasion de les oublier devient une caisse de résonance monstrueuse qui n'entend plus que leur discours.
Un rein, un poumon, un cœur, ce sont de merveilleuses machines qui ont l'élégance suprême de se faire oublier alors qu'elles nous permettent de penser, d'aimer, et de prendre du plaisir, comme si nous étions un pur esprit immortel qui ne doit rien à personne. Malheureusement, le temps, dans la coulisse, passe consciencieusement son papier de verre sur la soie friable de nos muqueuses, et prépare en secret une tout autre histoire.