J'adore les "djangos", comme les appelait Serge. Ces guitaristes qui ne se posent aucune question, qui jouent leurs "plans" le plus vite possible, avec le plus de dextérité possible, qui travaillent leur guitare toute la journée, même aux toilettes, même en regardant la télé, qui se nourrissent de plaquettes de chocolat et de bière, qui enfilent les traits comme des malades, je les adore. Ils semblent faire partie d'une secte, ces parfois très jeunes musiciens. Le manche d'une guitare est bien adapté à cette forme d'esprit, puisque les notes conjointes ne se trouvent pas les unes à côté des autres, comme sur le clavier du piano par exemple. On saute de quarte en quarte, toujours dans un raccourci, toujours en descente, le cul en l'air, la clope au bec. Toujours plus vite, toujours plus dopé, toujours plus speed, une main gauche qui semble sortir d'un film muet des années 20, vite, vite, encore plus vite ! Il n'y en avait qu'un qui pouvait les suivre, de quinte en quinte, c'était Stéphane Grappelli. Reinhardt, Grappelli, c'était la France ? Oui, bien sûr, que c'était la France ! Comme Miles Davis, un peu plus tard. Même Segovia admirait Django, et il faut bien reconnaître que Menuhin, à côté de Grappelli, fait un peu pitié… Des instrumentistes comme ça, ça console de beaucoup de choses, comme par exemple des journalistes qui tiennent des blogs en prenant la pose.