vendredi 18 mai 2012

Délivrance




"Soyez un homme de votre temps, achetez votre mauvaise conscience !" Mais pas n'importe laquelle, s'il vous plaît ! Achetez la Mauvaise conscience de Georges, achetez de la mauvaise conscience de qualité ! Durable, équitable, ne polluant que ceux qui l'ont mérité, elle est fabriquée selon les normes les plus exigeantes, par de vieux héritiers blancs ayant eu de la famille dans le gouvernement du maréchal Pétain et qui vont à Canossa sur les genoux en passant par Damas. Nos stocks ne sont pas inépuisables, la machine tourne à plein régime, les prix vont grimper, ils grimpent déjà !

À propos de conscience, Georges annonce officiellement qu'il augmente de trois cent trente pour cent son propre salaire mensuel, à compter d'aujourd'hui. Le but avoué de cette manœuvre est d'être plus riche que Cécile Duflot. Sans doute alors voudra-t-elle bien considérer la proposition de Georges de la prendre en levrette, la fenêtre ouverte sur les lavandes et le seringa. Alors, tandis qu'elle jouira bruyamment en affolant les vaches alentour, il lui récitera du Pindare en la fessant violemment. L'Orgasme de Fessenheim, rien de moins, cœur fondu et réactions en chaîne : les digues vont lâcher, les dogues se lâcher, le grand orgue en introduction, le philharmonique avant le dessert, et, en trou normand, un coup de bugle dans le vestibule. Il faut donner l'exemple, Cécile ! L'hémisphère sud qui l'exige le mérite amplement. 

Georges demande en outre à Ségolène d'arrêter d'appeler. Elle occupe la ligne alors qu'on attend des coups de téléphone importants. Sois raisonnable, Ségolène ! Il y a un temps pour tout ! Concentre-toi dès aujourd'hui sur 2017, tu verras qu'ainsi tu penseras moins à Georges. Ça passera, ça passera, comme tout finit par passer. Tante Glyne me le disait il y a déjà longtemps : "On se lasse de tout, mon Fifi, même des meilleures choses !" Ségolène, je te le dis tout net : à mon âge, on ne court pas deux lièvres à la fois, et au tien on doit manger de la viande. C'est ta dernière ligne droite avant la sortie de route, ne gâche pas tes chances pour la France pour un coup de chalumeau de trop ! Il a réussi ; pourquoi pas toi ? Tu ne me remercieras pas mais j'ai le sens du devoir et l'instinct des affaissements. 

"Feu !", lâche le Vice-Consul. "La France se doit", en effet. Elle se doit à tous, à tout, et surtout à toutes, à commencer par elle-même, cette vieille garce dégen(é)rée, la poitrine au vent et le cœur sur la main. Feu sur qui, Monsieur ? Mais là, tu ne vois pas, celles-zet-ceux, dans les collines, dans les campagnes, dans les vignes, dans les chemins creux du maquis ? Elles-zet-ils s'incrustent, elles-zet-ils se croient encore chez eux, elles-zet-ils ne savent pas que la France se doit. Elles-zet-ils veulent en découdre, nous allons leur donner de la piqure et du point de côté. Feu, feu, feu, sur ces trous de balle à blanc, tu auras tout le temps de réfléchir après, après le devoir, après la récitation et le spasme. Feu, foutre dieu, ou je t'envoie accompagner Fabius à Calcutta, tu feras moins le malin, les pieds nus dans la crotte ! 

Le directeur de cabinets tire la chasse plusieurs fois par heure, préventivement, non, pédagogiquement. Il faut habituer les tuyaux à faire circuler l'information étronique. C'est lorsqu'on n'a rien à dire qu'elle circule le mieux, avec une fluidité de bon aloi qui réjouit les curés laïques et les enfants constipés, derrière leurs écrans nacrés. Comme la France, le Canal laqué + de la Bonne Parole se doit de n'être jamais bouché. Lieux de traverse tous les deux, au hasard du GPS (passant la frontière, le Coyotte annonce une zone de danger de mille kilomètres et invite à ralentir fortement, et plus si affinités, car les radars de Maman Cordicopole guettent). Tous ceux qui ont été nourris au sein de l'égagalité du vieil incontinent vous le diront : se frapper le cardon et faire son auto-critique plusieurs fois par jour n'est qu'un préalable, ça ne suffit pas. Ce qu'il faut, c'est anticiper, être dans l'après avant même le maintenant. Barak l'a dit, François le fera. Et l'on nous répétera que ça n'a pas grande importance, que c'est du festif écclésial de toute manière déjà advenu. Mais je vais pour cette fois éviter le dérapage homophobe et reprendre quelques fibres optiques. Je dois encore travailler mon redressement productif, m'a fait comprendre Arnaud, tandis que George m'assure que je peux encore progresser en réussite éducative. L'informe étron, c'est maintenant, Georges ! Tu n'auras pas de seconde chance !

La seule nouvelle vraiment étonnante dans la semaine que nous venons de vivre est que Frédéric Martel n'ait pas été nommé ministre de la Culture. Je ressens cette anomalie comme une faute de goût, et peut-être même un péché. Lui seul aurait été à sa vraie place. (Non, j'exagère un peu, Kader Arif aux Anciens Combattants me semble parfaitement à sa place.) Le progressiste Hollande a encore un peu froid aux yeux, sans doute, mais soyons optimiste : à force de fouler des tapis rouges guidé par la main ferme de Maman, ses pas vont s'affermir et leur direction prendra tout son sens, qui est de nous amener à considérer l'abîme avec la joie soulagée de l'étron qui se dirige vers la sortie. Enfin !, semblent se dire tous ces gens. Après cinq années de constipation chronique, les Français se lâchent. Il restait encore quelques anachroniques grumeaux de francité, plantés ici ou là, qui empêchaient (si peu, pourtant) la circulation du désir océanique et horizontal, il était plus que temps qu'on ouvre les vannes en grand. En selles, citoyen de l'Hexagone, ton heure de glaire est venue. La France se doit !